Du Gâtinais au Var en Hotchkiss J2
Comme pressenti la veille, le silence du golf a été favorable à une bonne nuit de repos. Au petit jour, le soleil à peine levé, l'arrosage automatique se met en oeuvre. L'eau est pompée dans une retenue au fond du vallon. Les restrictions d'eau ne semblent pas d'actualité dans cette partie de l'hexagone. Rassurez vous, Chamousette restera au sec!
La batterie s'est bien rechargée. La lune encore présente nous fait un clin d'œil. Elle a veillé sur notre sommeil.
Le commentaire de Chamousette: Je confirme, la nuit a été paisible. J'espère juste que la lune ne va pas avoir décoloré ma couleur!
Au programme d'aujourd'hui, le contournement de Lyon pour rejoindre l'enclave des Papes en passant par le Vercors et le Diois. Nous traverserons successivement quatre départements.
La première ville où nous nous arrêtons est Crémieu. Du département de l'Ain, nous sommes passés dans l'Isère.
Si l'on a trouvé des traces de vie dans la période allant de 13 000 à 10 000 avant JC, les vestiges architecturaux de Crémieu trouvent leurs origines au XIIe siècle. La ville est d'ailleurs classée en ZPPAUP (Zone de Protection du Patrimoine Architecturale Urbain et Paysager !)
La Porte de la Loi est une des portes qui permettaient de rentrer dans la ville. Son origine date du XIVe siècle. Elle a fait l'objet d'un renforcement au XVe. L'affiche informe les passants des dates des prochaines médiévales, les sept et huit septembre prochains. Cette année, ce sont les rapaces qui seront à l'honneur.
Ce sont des mesures fiscales (déjà!) qui incitent à la création de la ville basse.
La visite de la ville s'effectue à pied en suivant les cinquante-deux plaques apposées sur les murs des édifices les plus remarquables. Parmi ceux-là, je vous propose la nouvelle église des Augustins. La nouveauté étant toujours relative, elle date tout de même de 1330 - 1340! Elle est adossée aux murs d'enceinte (le chevet de l'édifice se confond avec le rempart de la ville).
En 2000, pendant des travaux de restauration, des peintures médiévales ont été mises au jour. Témoignage historique de premier plan, une vingtaine de scènes sont identifiables sur des thèmes majeurs de la spiritualité des Augustins. C'est la première fois qu'apparaissait, en France, une composition d'une telle ampleur dans un couvent d'ermites de Saint-Augustin.
"Les décors de Crémieu n'ont pas été peints « a fresco » - terme technique désignant l'application de la couleur dans l'enduit frais, qui a donné le mot « fresque » - mais à la détrempe ou dans une technique mixte. La couche picturale, posée après coup, constitue donc une fine pellicule, fragile. Terni par la poussière ou dégradé par l'humidité, usé par le frottement ou les nettoyages inadaptés, dégradé, martelé pour recevoir de nouveaux enduits, le décor peint est souvent incomplètement conservé et peu lisible lors de son dégagement. Pour le restaurer, on fait appel au concours de spécialistes, qui vont d'abord nettoyer et fixer les peintures, avant de combler les lacunes. En rebouchant les trous dans l'enduit puis en retraçant les contours disparus, le restaurateur rend à l'oeuvre sa cohérence ".
Juxtaposé à l'église se tient le cloître du couvent voisin. Son architecture classique est caractéristique du XVIIe siècle. Les voûtes se suivent selon un rythme régulier et les formes sont d'une totale sobriété, sans fioritures ostentatoires. Le cloître était voué à la détente, à la méditation et à l'éveil spirituel. Les moines se promenaient dans le déambulatoire. Les parterres au centre ainsi que le bruit de l'eau du bassin étaient censés y faciliter le recueillement.
Indiqué comme le monument le plus prestigieux de la ville, l'ancien couvent des Augustins est maintenant occupé par les équipes municipales. Au début du XIVe siècle, Jean II fonde, dans la partie neuve (basse) de la ville, un prieuré destiné à accueillir une dizaine d'ermites de Saint-Augustin, ordre mendiant formé au XIIIe siècle.
Deux pièces sont ouvertes au public: la salle capitulaire et le chauffoir.
Le chauffoir est en réalité une cuisine.
L'ensemble église, cloître et couvent vus de l'extérieur de la basse ville, de l'autre côté du fossé, illustrent bien la construction sur les murs d'enceinte.
Après cette pause, nous reprenons la route en direction du Vercors que nous apercevons au loin. Nous traversons, ou devrais-je dire descendons, la petite ville de la Côte-Saint-André, dans laquelle Hector Berlioz (1803-1869) naquit. Sa maison natale est d'ailleurs devenue un musée à son nom. Un festival de musique s'y tiendra du 17 août au 1er septembre. Si fêter les 150 ans de sa mort vous tente, n'hésitez pas à prendre connaissance du programme sur le site du festival.
Le profil du parcours devient rapidement montagneux. Si nous ne sommes pas encore en montagne, le relief n'est qu'une succession de montées et de descentes. Nous arrivons dans les Préalpes.
Quand on parle du Vercors, la plupart des gens pensent à Villard-de-Lans et aux communes qui l'entourent. Ce sont des villages fort sympathiques tournés essentiellement vers le tourisme blanc et vert. Quand je parle du Vercors, je pense à la partie ouest - sud-ouest, située de l'autre côté des gorges de la Bourne. Et justement, merci pour cette brillante transition, les gorges de la Bourne démarrent à Pont-en-Royans.
Commune du Parc Naturel Régional du Vercors, Pont-en-Royans présente un côté pittoresque, avec ses vieilles maisons suspendues au-dessus de la Bourne. Un ensemble insolite et particulièrement photogénique que l'on peut admirer depuis le pont Picard et les berges de la rivière.
Ce que les guides ne disent pas, c'est que les rues étroites ne favorisent pas du tout la circulation automobile. Et ce qui devait arriver arriva, un camping-car et un autocar rencontrèrent un camion à l'endroit le plus exigu, qui bien entendu est dans un virage sans visibilité. Spectacle qui ravit les touristes attablés aux terrasses des cafés, car il est toujours amusant de voir les autres dans la m... Bref, à coup de marche arrière et de supplications, le bouchon se désintègre et nous pouvons attaquer la route des Goulets.
Pour tout vous dire, j'y ai appris à conduire. Pendant près de vingt ans j'ai passé mes vacances sur le plateau du Vercors. Mais depuis ma dernière visite, et devant les éboulements répétés, un tunnel a été creusé sur la partie haute en lieu et place des Grands Goulets, creusés au XIXe siècle à flanc de rocher dans la faille devenue très étroite. Il faudra quatre ans pour finaliser les 1700 mètres de belle route éclairée qui débouchent au lieu-dit Les-Baraques-en-Vercors, à cent mètres de l'ancienne route.
Je ne vais pas vous faire l'affront de publier une photo du tunnel. Une photo d'époque des goulets me semble plus pertinente pour illustrer cette partie du voyage.
Le commentaire de Chamousette: Je couine de partout (bizarrement, j'ai déjà pris l'accent et des expressions du midi!) et peuchère, j'ai parfois la tête qui tourne quand on me fait prendre trop de virages!
Bref, c'est sur le coup de 13h00 que nous arrivons dans le village de La Chapelle-en-Vercors. Pour celles et ceux qui n'auraient pas en tête l'histoire récente de cette partie du pays, le Vercors a été un haut lieu de la Résistance pendant la guerre de 39 - 45. Par mesure de rétorsion, les troupes allemandes ont complètement détruit la plupart des villages du plateau. La Chapelle, comme Saint-Aignan ou Vassieux-en-Vercors, ont fait l'objet d'une reconstruction totale à partir de 1948.
Avec une altitude moyenne de 900 mètres, le village est plutôt une destination d'été que d'hiver. Les stations de ski sont à plus de quinze kilomètres et pas toujours enneigées. Destination de nombreuses colonies de vacances pendant les vacances d'été, la piscine y est l'activité principale. J'y ai fait mes début de natation et rien, ou presque, n'a changé depuis.
Mais revenons à l'histoire du village:
"Le 25 Juillet 1944, venant de Vassieux où ils avaient été aéroportés, des éléments de choc de la Waffen SS arrivent à La Chapelle qui va vivre des heures hallucinantes. La journée de traque est suivie d'une longue, très longue nuit pour la partie de la population enfermée dans le bâtiment de l'école étroitement gardé par les combattants nazis. Nuit d'apocalypse qui s'écoule lentement à la lueur des flammes jaillissant de l'immense brasier du village incendié. Nuit rythmée par le crépitement lancinant d'un mitraillage répétitif…
Puis vient l'aube tragique qui découvre les corps de seize otages abattus dans la cour de la ferme Albert... Une commune à feu et à sang, des maisons qui ne sont plus que cendres et murs calcinés. Mais surtout, la stupeur muette devant la mort brutale de trente-deux habitants âgés de 5 à 82 ans... Les dernières victimes du massacre seront, le 7 Août 1945, cinq enfants du hameau de Gagnaire arrachés à leurs jeux par l'explosion d'une grenade "abandonnée" là par des combattants que hantait déjà le spectre de la défaite. Pour les survivants déchirés entre amertume et désarroi, la vie s'écoule pesamment jusqu'au 15 Août, date à laquelle l'annonce du débarquement allié en Provence fait s'enfuir les troupes d'occupation."
Ces évènements ne sont pas gais, mais il faut les garder en mémoire. C'est ce qu'a fait la municipalité en agençant un lieu de mémoire sur le lieu de l'exécution, la cour des fusillés.
Nous reprenons la route pour franchir notre premier col: le col de Rousset. Station de ski l'hiver, mais souvent dans le brouillard, ou station verte l'été, ce col de 1254 mètres marque la frontière avec le midi.
Le commentaire de Chamousette: Alors là c'est le bouquet! Cinq cents mètres de dénivelé négatif! Mes freins sont à la peine et dans les virages serrés il m'arrive de sortir un peu à gauche, mais je suis bien contente quand même car du coup ma température est descendue un peu. Depuis que j'ai une nouvelle pompe à eau, je ne chauffe plus du tout! Vous allez rire: nous avons été filmés. Avec tous les bruits que je fais on dirait que je me suis transformée en transistor!
Et bien sûr les champs de lavande font leur apparition.
A quinze kilomètres du sommet, le village de Chamaloc présente une particularité qui n'a rien d'historique ou de géographique. C'est le lieu choisi pour une opération de reintroduction du vautour fauve. Le lâché a eu lieu à l'automne 1999 et, à en juger par le nombre d'oiseaux visibles au-dessus de nos têtes, avec succès.
C'est à Dieulefit que nous laissons Chamousette se reposer. Nous sommes dans la Drôme provençale, et cette petite cité se targue d'un climat favorable et d'un air bénéfique pour les voies respiratoires.
Nous arrivons au terme de notre deuxième journée à Visan. C'est à mon avis un des plus beaux villages du sud de Valreas. La journée a été éprouvante pour les organismes. Bien avant la fin de la journée, ma montre m'indique que j'ai atteint mon quota d'exercice! Il faut croire que manœuvrer Chamousette sur des routes de montagne doit être considéré comme du sport!
Comme d'habitude, l'accueil des propriétaires de l'hôtel est parfait. Nous avons notre chambre habituelle. La fenêtre donne juste en face de Chamousette. Position idéale pour brancher le chargeur de batterie! Et puis le restaurant est accessible à pied!
Le commentaire de Chamousette: Je ne sais pas ce qu'ils me réservent pour demain mais les 321 km du jour m'ont sérieusement secouée ! Un truc à me provoquer une descente d'organe!
© Eric Nicolas 2021. Site créé par l'Astrolabe 🚀